L'ordinateur quantique expliqué simplement

Vous n'avez rien compris à l'informatique quantique ? Voici l'introduction la plus simple possible !

Article publié le 20/10/2021, dernière mise à jour le 19/09/2023

Depuis que j'ai commencé à entendre ce terme il y a des années (sans doute à l'université), j'ai toujours été intrigué par ce que pouvait être un "ordinateur quantique".

Je connais l'informatique (plutôt bien), je connais la physique classique, et quelques concepts de physique quantique, mais je ne comprenais pas comment les deux pouvaient être liés pour former une "machine" capable de faire des calculs, et soit disant des milliards de fois plus rapides que les ordinateurs classiques.

Voilà pourquoi j'ai décidé de démystifier le concept d'informatique quantique pour vous le présenter de la manière la plus simple possible.

Le concept

La première chose qui différencie notre informatique classique de l'informatique quantique réside dans l'échelle des éléments utilisés pour effectuer des calculs et stocker des informations.

Pour simplifier, un ordinateur classique utilise une grande quantité d'atomes de cuivre pour acheminer des électrons en mouvement (électricité) jusqu'à des composants qui utiliseront cette charge électrique afin de changer d'état (comme un interrupteur), pour stocker des données et effectuer des calculs en utilisant les propriétés de matériaux semi-conducteur comme le silicium.

Chaque transistor en silicium pourra stocker 1 bit (1 ou 0).

Un ordinateur quantique, lui, va utiliser des atomes individuels neutres (le rubidium par exemple), qu'il va déplacer et configurer à l'aide de lasers afin de stocker des données et effectuer ses calculs.

Chaque atome pourra stocker 1 qbit (ou quantum-bit, l'équivalent de 2 bits classiques, superposés)

La différence

Quel est l'intérêt d'utiliser un ordinateur quantique plutôt qu'un ordinateur classique ?

Pour comprendre la différence entre les deux, il faut noter quelque chose de très important : l'échelle de grandeur.

Dans le système classique, des millions d'atomes de matière (cuivre, silicium, etc...) et des milliards d'électrons sont en interaction les uns avec les autres, tandis que dans le système quantique, on sépare les atomes pour les manipuler un à un.

Dit comme ça, la différence ne parait pas gigantesque, mais il faut comprendre que lorsque l'on se trouve à l'échelle de l'atome, cela change tout.

En effet, grâce à la physique classique, nous sommes capable de prédire globalement ce que va faire un groupe d'atome, ou d'électrons. Mais individuellement, à l'échelle quantique, cela devient physiquement impossible car leur comportement est imprévisible.

Pour comprendre ce changement d'échelle, imaginez une usine de production de voiture propulsée par 2000 employés : Vous pouvez prédire que cette usine produira environs 180 véhicules par jour (plus ou moins un), toujours de la même qualité et les mêmes caractéristiques.

Pourtant, à l'échelle d'un seul employé, vous ne pourrez jamais prédire que cet employé fournira toujours le même travail, à la même cadence, à la même heure. Il tombera même peut-être malade, ou démissionnera.

Et pourtant le système au globalement continuera de fonctionner et restera prédictible.

Et bien voilà la différence d'échelle entre un ordinateur quantique et un ordinateur classique, et ce pourquoi leur fonctionnement interne est différent.

Le principe des qBits

Je vous ai dit que les ordinateurs quantiques pouvaient stocker l'équivalent de deux bits superposés dans un seul atome, mais comme cela fonctionne ?

Je pourrais vous dire que c'est grâce à une propriété quantique que l'on appelle la superposition d'états, mais cela ne vous avancerait pas à grand chose. Imaginez simplement que l'on remplace les atomes et les électrons par des ballons :

Dans un ordinateur classique on prendrait un ballon pour tirer sur un interrupteur (le transistor), alors on ne pourrait mesurer qu'un seul état à chaque fois (allumé ou éteint, 0 ou 1), soit un bit.

Dans un ordinateur quantique, on va prendre un ballon (à la place de notre atome), et au lieu de le lancer, on va le faire tourner, ou non. S'il tourne de haut en bas, alors sa première valeur sera 1, mais s'il tourne de gauche à droite, c'est sa deuxième valeur qui sera à 1.

Ce qui veut dire que si l'on fait tourner ce ballon de gauche à droite ET de haut en bas (une trajectoire finale qui sera en diagonale), alors nous aurons superposé deux valeurs, soit un qBit.

Les valeurs possibles d'un qBit sont donc : (0,0), (0,1), (1,0) et (1,1)

En l’occurrence on ne fera pas réellement tourner un atome sur lui-même, mais le principe reste le même pour la superposition d'états.

Quelles contraintes ?

Maintenir une "poignée" atomes configurés de telles manières à représenter des données pour effectuer des calculs est extrêmement complexe. Il est notamment nécessaire de les maintenir à une température très basse afin de les empêcher de se mettre en mouvement.

De plus, rien que la configuration de la grille d'atome (comme une grille mémoire classique) est périlleuse et ne fonctionne pas à chaque fois.

Cela implique deux contraintes majeures :

  • Le nombre de qBits simultanés dans un calculateur quantique reste relativement faible. (En 2021, le record est de 256 qBits)
  • Chaque calcul doit être refait des dizaines voir des centaines de fois pour palier au manque de précision des processeurs quantiques actuels

Quels calculs ?

À l'heure actuelle, un ordinateur quantique est capable de résoudre les mêmes problèmes qu'un ordinateur classique, mais à la hauteur de sa puissance ramenée en bits (soit 512 bits pour le record actuel), ce qui est assez peu.

Néanmoins, ce n'est pas pour résoudre les mêmes problèmes, et les mêmes algorithmes qu'un calculateur classique qu'a été inventée l'informatique quantique.

C'est en se servant des nombreuses propriétés quantiques très complexes (superposition d'états, intrication, imprédictibilité,...) qu'il est possible de résoudre certains algorithmes qui seraient trop complexes pour un système classique car le fonctionnement interne de notre électronique n'est pas prévue pour cela.

L'un des exemples les plus simples à comprendre est par exemple la génération d'un nombre aléatoire, car en informatique, il est impossible de générer un nombre purement imprévisible, alors qu'en informatique quantique, c'est possible.

Si vous voulez en savoir plus, j'ai écrit un article intitulé "Pourquoi l'aléatoire n'existe pas en informatique"

En résumé

Un ordinateur quantique est différent car il effectue des calculs avec des atomes sélectionnés un à un, et qui ne régissent plus à la physique classique (newtonienne), mais aux lois complexes de la physique quantique.

On ne se sert pas des calculateurs quantiques pour effectuer les mêmes calculs que font nos ordinateurs, mais pour résoudre des algorithmes spécialement taillés pour ces derniers et auxquels l'informatique classique se heurte.

Pour aller plus loin

Si le sujet des ordinateurs quantiques vous intéresse, je vous invite à écouter la superbe interview de Constantin Dalyac sur IFTTD, lui-même Quantum Software Engineer !


Anton Maksimov juvnsky sur Unsplash

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